Le rapport de Denis Piveteau et ses préconisations (« zéro sans solution ») nous engagent à sortir des impasses qui se traduisent souvent par des «situations critiques ». Cela suscite de nouveaux paradigmes d’action, d’organisation et de coopération mais aussi l’évolution des procédures administratives. Dans notre nouveau contexte régional, le CREAI ORS et l’URIOPSS Grand Sud ont organisé cette journée régionale le 17 novembre à Carcassonne, en présence de Marie-Sophie Desaulle, engagée depuis un an dans la conduite de cette mission « une réponse accompagnée pour tous ». Elle en a précisé les axes fondamentaux de changement ainsi que les étapes et modalités permettant la mise en œuvre progressive des propositions de ce rapport.
Les échanges qui ont suivi durant cette journée ont mis en perspective des leviers offerts par les possibilités locales, tout en interrogeant les difficultés persistantes et les modalités progressives d’atteinte aux objectifs communs. Après des présentations des sites pionniers (MDPH 66 et MDPH 11) qui ont permis de faire un point d’avancement de la mission « une réponse accompagnée pour tous » sur ces départements, les Equipes Relais Handicaps Rares de Languedoc-Roussillon et de Midi-Pyrénées ont pu témoigner des dynamiques à l’œuvre pour tenter de répondre aux « sans solution ».
Nous avons d’abord proposé une représentation des situations complexes qui nous sont soumises, et ce qu’elles révèlent de l’absence de « solution » adaptée. Un certain nombre de freins à la mise en place de réponses ont été relevés : une implication hétérogène des acteurs dans les nécessaires coopérations, les difficultés à sortir des cadres habituels et agréments, la faible anticipation des parcours. A l’inverse, les Equipes Relais relèvent plusieurs leviers porteurs : l’engagement collaboratif dans des évaluations multidimensionnelles et interdisciplinaires, les volontés de partage d’expériences, les concertations autour de situations critiques rassemblant professionnels et institutionnels.
De manière générale, le manque de places apparaît largement préjudiciable à la fluidité des parcours : d’une part en cas d’attente durable d’accompagnement spécialisé, mais surtout parce qu’une place (même partielle, temporaire) constitue aussi un pivot, coordinateur et activateur de parcours. En effet, les établissements et services médico-sociaux concernés sont largement mobilisés et impliqués pour tenter d’associer des partenaires et construire des solutions. Ils sont généralement en première ligne (notamment, en ce qui nous concerne, les IME et IES, les foyers et MAS) pour rechercher des relais, des appuis, pour initier des coopérations et susciter la co-responsabilité face aux situations complexes rencontrées.
Dans ces dynamiques, les Equipes Relais prennent généralement un rôle de facilitateur dans les mises en lien : information, orientation, sollicitation de partenaires de proximité, appel aux ressources expertes nationales, repérage d’établissements ou services porteurs d’expériences similaires, appui aux dossiers (d’admission, d’orientation…). Cette fonction est largement facilitée par la position de tiers que prennent les Equipes Relais.
Dans ce contexte, un enjeu est alors le suivant : comment passer de la mise en lien (autour d’un pivot) à la mise en réseau (sur un territoire). En d’autres termes, comment le traitement coopératif d’une situation complexe alimente et conforte un potentiel d’intervention local ? Comment les acteurs locaux (social, médico-social ou sanitaire) peuvent-ils être alternativement « pivot » sur les situations qui les concernent directement et partenaire actif sur d’autres situations du territoire ? Comment soutenir des réseaux durables, qui perdurent au-delà d’une dynamique conjoncturelle sous une forme propre et dissociée de la situation qui en était à l’origine ?
Pour que l’intégration réponde effectivement « à la discontinuité des services rendus et conduire à de nouveaux modes d’organisation des partenaires axés sur la logique de parcours », il apparaît essentiel de valoriser les initiatives déjà à l’œuvre sur nos territoires, tout en insufflant des dynamiques d’échange et d’interactivité. Et sans pour autant opposer logique de parcours et logique de places, car ces dernières apparaissent bien comme des supports précieux pour la coordination et la coopération.